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20 janvier 2013 7 20 /01 /janvier /2013 18:10

J4 1870Ce matin, nous avons décidé de nous lever pour voir le lever de soleil sur la Causse. Le réveil a été mis à 6h30 et c'est dur ! Le vent souffle toujours aussi fort et il est relativement froid. Nos corps encore tout ensommeillés ne sont pas de taille à l'affronter, nous prenons nos duvets pour nous emmitoufler. Notre emplacement à l'Est du Causse est stratégique pour apercevoir les premiers rayon dorer les herbes folles. Nous remontons au promontoire et nous installons un peu en contrebas sur la falaise, le dos au rocher pour nous abriter du vent et nous caler pour le spectacle.

 

L'aube est jaune et violette au début, rythmée par les zébrures des traces d'avions passés. J4-1884_HDR.JPGDans le fond, la vallée de Florac est encore endormie sous une épaisse couche de mer de nuages. Imperceptiblement, les teintes se réchauffent, l'air s'illumine, les vapeurs se dissipent. Les Cévennes, qui nous font face, secouent leurs dernières ombres au creux des noires vallées car déjà leurs flancs orientaux reçoivent les premiers rayons. Il nous faut attendre encore quelques minutes, un peu après 7h00 pour avoir nous aussi droit à la caresse solaire. Les falaises calcaires du Méjan se parent de riches couleurs et ressemblent à un empilement de lingots.

J4-1889.JPG J4 1891

Bien que la température, fraîche, soit parfaite pour randonner, nous préférons, par faiblesse, nous recoucher un peu. Mal nous en prend... ! Nous nous re-réveillons vers 11h00 dans une étuve intenable. Dehors, le vent s'est apaisé et la lumière est blanche, aveuglante, implacable. Nous petit-déjeunons et nous partons vers notre destination du soir : Nîmes le Vieux. La fournaise est pratiquement à son paroxysme à cette heure là et nous sommes dans la partie du Causse la plus dépourvue en forêt et arbres : devant nous, à perte de vue, des steppes d'herbes rases ou hautes, un mélange entre la savane et les paysages Mongols. L'avantage de ce paysage ouvert c'est que l'orientation est aisée et se fait à la vue, nous savons en gros notre azimut à suivre et nous pouvons donc divaguer dans la grande prairie parsemée de collines. Nul besoin de suivre les chemins et les balises : la liberté du marcheur exacerbée !

 Pano19

Pourtant, pas de folies : le soleil tape dur et nous n'avons pas une réserve d'eau illimitée, le prochain ravitaillement se fera à l'arrivée.

 

Nous longeons le bord du Causse pendant un bon moment, la piste caillouteuse et poudreuse s'étend devant nous comme un coup de craie sur un tableau d'écolier. Nous rattrapons deux personnes au moment où le chemin part à angle droit dans la steppe, au niveau d'un menhir. Il n'y a plus de chemin d'ailleurs, il faut suivre les balises tant bien que mal au milieu des touffes de buis. Je ne sais pas si nous sommes les premiers aujourd'hui à passer par là, mais ce qui est sûr c'est qu'une demoiselle y a laissé tomber son t-shirt. Je le ramasse et l'accroche à la ceinture de mon sac-à-dos, qui sait si on ne la rattrapera pas en route.

 J4-1904.JPG

Passé cette zone hors-piste, nous retrouvons un chemin, mais la carte nous indique qu'il fait un large virage par la gauche pour atteindre le bord du plateau. Le paysage et l'humeur du jour nous intime l'ordre de couper à travers champs : pourquoi pas vers ce sommet là-haut ? Nous aurions une belle vue pour manger ! Et nous voilà parti pour l'ascension de la colline au nord du mont Gargo, 1141 m, un des plus haut sommets du Causse. Enfin ! On coupe à travers champs, nos jambes s'affolent de cette nouvelle liberté ! La montée au soleil nous fais perdre un bon litre de sueur, je pose mon t-shirt et met celui que j'ai trouvé sur ma tête à la façon d'un chèche. Je n'ai pas tellement envie de me prendre une insolation au milieu de nulle part ! De même, Amandine se met en haut de maillot de bain. Au sommet, un pin rabougris nous fera de l'ombre pour la pause. La vue est magnifique à 360°, on voit un bon bout du Causse ! En revanche, les insectes volants sont innombrables et fort inconvenants.

 Pano20.jpg

Dans la descente, nous effrayons un petit troupeau de moutons qui s'était mis à l'ombre d'un frêne solitaire. La steppe ondule, écrasée par la chaleur. Nous continuons notre progression vers le SE en passant par la Combebelle : dans cette cuvette à l'abri du vent, c'est l'enfer, comme dans ces rares zones arides de la planète qui se trouvent au dessous du niveau de la mer. J4-1913.JPG On longe le fond de la cuvette, bordé à l'Ouest pas la Serre de Fourcat (tient, un nom bien Pyrénéen !). Nous passons deux sortes de cols, très larges et très plat, plutôt des plateaux s'incurvant de part et d'autre. Au deuxième nous retrouvons une piste bien marquée que nous suivons encore une petite demie-heure avant de trouver le seul et unique arbuste du coin pour nous faire de l'ombre. La pause est salvatrice : il est 15h, on a l'impression que les hautes herbes vont s'enflammer spontanément sous l'ardeur du soleil.

 

Nous sommes bientôt arrivés : le contournement du Tourel (1211 m) nous fera rejoindre Villeneuve, puis le Veygalier par la route, où nous dormirons. Parmi les cailloux du chemin un m'attire l’œil, il possède un côté strié : c'est un bout de fossile. Le bloc fait dans les 20x20x20 cm, je le projette violemment sur un autre pour le fendre. Dans les débris, je trouve une magnifique ammonite d'une quinzaine de cm de diamètre : malgré le poids du sac je décide de la garder ! Je rejoins Amandine qui me fait les yeux du « mais t'en as pas marre de gratter tout le temps dans les cailloux ? T'as vraiment rien de mieux à faire ? ». Tout content, je lui montre ma trouvaille qui n'a pas l'air de l’extasier le moins du monde...

      Pano21.jpg

A Villeneuve, nouvelle pause à l'ombre, il est 16h00, il ne nous reste plus grand chose à faire. Ça n'aura pas été une grosse journée, mais la chaleur l'aura rendue épuisante quand même ! Les 1,5 km de goudrons sont un peu dommage pour finir, mais on espère trouver un bon emplacement pour la guitoune ce soir. Nous entrons dans les prémisses du chaos de Nîmes le vieux et les rochers érodés aux formes étranges commencent à sortir de terre. Ça serait bien le diable si on ne trouvait pas un coin tranquille.

 

Le Veygalier est surtout composé d'une grosse ferme avec hangar puant l’ensilage et tutti quanti. Mais par derrière, se trouvent une demie-douzaine de maisons en pierres de calcaire qui se fondent parfaitement dans le décors du chaos rocheux. J4-1916.JPG La plus grande d'entre elles est une ferme auberge avec une charmante terrasse ombragée et fleurie qui nous fait de l’œil. Un petit groupe de randonneurs est déjà là et sirote tranquillement un soda. On s'installe pour faire de même, il doit être dans les 16h30 et rien ne presse. De plus, notre stratégie pour planter la tente en milieu « urbain » nous oblige à attendre le coucher du soleil pour éviter tout dérangement impromptu. On en profite aussi pour re-remplir nos bouteilles d'eau qui sont à sec. J4-1926.JPGLa fin d'après-midi se passe ainsi à discuter avec les promeneurs et randonneurs qui passent inévitablement par cette étape.

 

Comme nous sommes en avance sur notre plan (en fait, nous voulions garder une journée sous le coude en cas de pépin), nous décidons que le lendemain serait journée de « repos ». Et plutôt que du repos, nous ferons une rando dans le chaos de Nîmes le vieux et autour, mais sans les sacs et la tente sur le dos, histoire de profiter au mieux de cette sublime partie du Causse. Nous en profiterons aussi pour manger à  l'auberge demain soir, histoire de reprendre des forces. Nous prenons la réservation et nous partons en quête d'un emplacement discret pour notre tente. Au dessus du village se trouve une crête parsemée de rochers chaotiques dont un énorme perché en équilibre au dessus des autres. C'est vers cette vigie naturelle que nous nous dirigeons, peinant sous la reprise du sac.

 

Il ne nous faut pas longtemps avant de trouver un emplacement caché de la route et des chemins alentours. Au milieux des rochers, àJ4-1948.JPG l'abri du vent, avec une vue romantique sur les Cévennes. Une fois encore, il nous faut faire un peu le ménage des chardons dans le gazon : armés de nos couteaux, la tâche ne prendra pas plus d'un quart d'heure.  La tente plantée, Amandine reste un peu à buller, tandis que j'explore les rochers du coin. Il y a de quoi faire de belles parties d'escalade. Plus tard, je pars monter sur la colline derrière « chez nous », une strate de calcaire révèle quelques fossiles : j'en ramène quelques uns à Amandine pour la faire enrager. En escaladant les blocs près de la tente, je trouve une cache parfaite pour nos affaire pour le lendemain. En effet, même si nous ne prenons pas nos affaires avec nous, nous n'allons pas les laisser au milieu des rochers à la vue de tous, surtout qu'en journée la zone doit grouiller de touristes et promeneurs. Nous démonterons la tente et laisserons nos affaires superflues dans J4-1937.JPGcette anfractuosité de la roche.

 

Le soleil se couche et les ombres se font rasantes, nous montons près du rocher en équilibre pour prendre « l'apéro » : une poignée de cacahuètes et un verre d'eau.  De là, dans les rayons horizontaux du soleil, nous assistons à un spectacle inédit. Une multitude de fourmis volantes, regroupées dans un immense nuage passe dans le courant d'air du col sur notre droite. Durant près d'une heure les volutes animales portées par le vent passent devant nous, certaines se posant sur les rochers alentours avant de repartir. Nous sommes à peu près à l'abri de notre point de vue et heureusement que nous avons mis le tente de l'autre coté de la crête, sinon le repas aurait pu être gâché... ! La scène est fascinante et nous ne retournons manger à la tente qu'une fois le soleil disparu derrière les collines face à nous. Il est 21h. Les Cévennes se parent de pourpre. La nuit sera pure et froide.

 Pano23.jpg

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8 mai 2012 2 08 /05 /mai /2012 12:42

J28 4651 La nuit a été chaude et sèche, nous n'avons pas si mal dormi que ça. En début de soirée, quelques voitures sont passées et nous nous attendions à nous faire jeter du pré, mais non, rien n'est venu. Pas plus que les potentiels bestiaux que les fils électriques gardaient. Nous avons décidé hier soir de partir de nuit, l'excitation de l'arrivée est de toutes façons trop grande pour dormir plus longtemps ! Je me suis réveillé juste un peu avant le réveil qu'on avait mis à 6h00. Nico bouge aussi. Le temps de plier les duvets et les matelas en mousse (couverts d'épines de chardons) et à 6h15, nous posons pour la photo de départ.  Les jambes démangent. Nous chaussons les frontales, passons la clôture électrique en faisant bien attention cette fois et nous revoilà sur la route. La lune va nous accompagner un peu ce matin bien qu'elle ne tardera pas à se coucher.  Après quelque pas de chauffe sur le goudron, le GR10 part à droite sur un petit sentier en sous bois pour couper les virages de la route. Au milieu de ces bois, on ne vois rien. Nico passe devant car sa frontale est plus puissante, il ouvre la marche tandis que je trébuche et glisse sur les rochers usés par les pas des randonneurs. A la sortie du bois nous atterrissons à Saint-Martin de l'Albère où nous reprenons pied sur la route. Pas pour très longtemps, le chemin coupant un virage, puis deux. J28 4653 Le Canigou veille sur nous en sortant de la brume avec sur son épaule la lune.

 

Nous mettons pied sur la route une dernière fois avant Banyuls. Et nous piquons tout droit dans la pente en face; Le terrain a été labouré par des camions de débardage, nous prenons sur la gauche une piste qui part à flanc. Au bout d'un quart d'heure, la piste s'interrompt nette et nous n'avons plus vu de balises rouge et blanche depuis la route... Comme toujours, nous ne ferons pas demi-tour. Une vague sente prolonge la piste dans la hêtraie, nous l'empruntons. Il va sans dire qu'elle disparaît aussitôt ! Nous voilà au milieu d'une forêt majestueuse dans une semi-pénombre avec pour seul point de repère, la pente. Nous savons que le chemin passe sur la crête et le sommet au dessus de nous et que le col de l'Ouillat est sur notre gauche. J28 4654 Nous avançons donc en écharpe avec pour ambition de couper le vrai chemin entre le col et le sommet. Nous avançons difficilement sans sentier car le terrain, très pentu et couvert de feuilles et glissant et peu praticable. Nous n'en pouvant plus de nous battre contre la nature, notre progression est vraiment pénible. Pourtant, au bout d'une petite heure d'effort, nous apercevons au dessus de nous une sorte de replat et une cabane qui pourrait bien être des indices du GR10. Le problème c'est que le talus créé par la piste accentue encore un peu plus la pente : nous sommes face à un mur de terre et de feuilles. Pour corser le tout, les ronces et les buissons denses se sont invités.  Nous galérons quelques minute et sortons de là en nage ! Mais sur le bon chemin ! Nous sommes à 100 m de l'auberge du col de l'Ouillat. Nous reprenons le chemin classique dans la grande forêt de pins et arrivons au sommet au moment où le soleil se lève sur le Canigou. C'est ici que nous prenons notre petit déjeuner à contempler le chemin parcouru ; il est 8h15, un groupe nous dépasse. Le reste de la journée devrait se passer tranquillement. Mais c'est sans compter notre appétit d'aventure et de galère !! 

J28 4655

En effet, nous partons en direction du pic Neulos et sa grande et moche antenne. Le groupe devant nous est à mi-pente quand nous arrivons à l'endroit où le chemin frôle la frontière barbelée. Ici il y a un portail qui mène en Espagne et un sentier en part.  L'idée nous prend de feinter le Neulos par le Sud, à flanc pour s'éviter une grimpette inutile suivie de sa redescente qui, si je me souviens bien, est pénible. Nous nous engageons dans le sous-bois espagnol, la crête que nous visons n'est pas loin devant nous : d'après la carte, en visant bien on devrait rentrer en France au niveau de la borne frontière n° 583. Les 300 premiers mètres se passent plutôt pas mal, mais ensuite, ça se gâte... !  Le sous-bois est loin d'être propre, les fougères et les ronces l'ont cordialement envahit, si bien que la progression devient vite impossible. J28 4656 En luttant contre ces murs verts, nous repensons à notre folle course d'orientation lors d'un raid aventure en Bretagne où notre compère JM avait donné de sa personne à travers les haies de buissons épineux pour nous permettre de passer.  On en rigole encore ! Cela n'entrave pas notre bonne humeur de la journée et à force de persévérance, nous sortons des bois, complètement griffés mais à deux doigts de la crête. En traversant la frontière, nous voyons le groupe de randonneurs finir de descendre du Pic Neulos : on est passé devant !! La suite du parcourt, magnifique, est une succession de crêtes pelées, bordées par des forêts de hêtres. La succession des pics se mélange dans ma mémoire, nous marchons à vu sur cette steppe. J28 4660 Nous faisons une pause casse croûte vers 10h30 au pied d'une colline assez raide qui doit être le Puig de Pradets. Sur ces crêtes, l'atmosphère est pure, mais on sent que le temps est en train de changer : de nombreux cirrus sont apparus haut dans le ciel qui avait été parfaitement transparent ces deux derniers jours. D'ailleurs, côté français, une immense mer de nuage nous cache la vue de la Méditerranée au Nord. Et au Sud, l'air est extrêmement brumeux et bleuté. Le paysage d'Espagne ressemble à une estampe asiatique avec ses plans qui s'estompent les uns après les autres. Mais la côte à l'air d'être dans les nuages, c'est dommage, on aurait bien aimé arriver sous le soleil. On espère juste qu'il ne pleuvra pas au moins...

 

Je ne me souviens plus qu'elles étaient nos conversations sur ce terrain facile. Nous devions sûrement nous projeter sur le restaurant du soir : quel serait le menu ? Peut-être avons nous aussi glosé sur nos sentiments au moment de toucher l'eau de la grande bleue, des leçons que nous tirerons d'une telle expérience, de nos prochaines aventures en montagne. Je ne sais plus. 

 

En longeant la frontière, je prend en photo le paysage de montagne à travers la clôture de fils de fer barbelé coupés, comme une parabole de la liberté dans les grands espaces des Pyrénées que nous avons embrassé durant un mois. La fin arrive, mais nous n'y croyons pas encore. On goûte à chaque pas désormais. Les souffrances passées sont déjà en partie oubliées. J28 4662

 

En fin, nous arrivons au Pic de Saillfort qui marque le début de l'irrémédiable descente ver la mer. On devine le golf de Banyuls dans les nuages au loin. Il est 13h00, il nous reste une longue et raide descente caillouteuse jusqu'au col de Vallauria. Puis une traversée à flanc jusqu'au col des Gascons pour enfin arriver dans les vignes de Banyuls. La végétation méditerranéenne nous a rattrapé ainsi que la chaleur, la lourdeur devrais-je dire ! Nous ne sommes plus habitués, après un mois passé en altitude, fouettés par l'air pur et vivifiant des montagnes. D'ailleurs au bas de cette descente casse-pattes, nous sommes à sec... Le soleil tape à travers les fins nuages et l'impression de lourdeur s'accentue. Ici, nous avons le choix : soit la piste, plate qui mène au col des Gascons, soit le chemin, qui monte un peu puis s'aplanie et est plus court. On prend le chemin bien sûr ! J28 4663 D'autant plus que la carte nous indique une source à mi-chemin. Le flanc de la colline a dû brûler récemment, on traverse un paysage désolé. Au lieu de la source, une ruine, mais de source point : elle s'est tarie avec la sécheresse.  La soif se fait plus pressante et il nous reste bien une bonne grosse heure de marche. On tiendra, sans problèmes, mais ce n'est pas très agréable... Mais finalement, nous arrivons au col des Gascon : porte sur la portion ultime. Et pour la première fois, nous voyons Banyuls !!! Au pied de ses vignes, dans les nuages, mais elle est là, à un jet de pierre ! Dans la descente, nous tombons sur une fontaine qui elle tombe à pic : nous allons pouvoir savourer notre final sans souffrir de la soif ! 

J28 4664 J28 4665   

 

Nous repartons donc de plus belle au milieu des vignes et des oliviers. Le raisin n'est pas mûr, dommage... On en aurait bien grappiller un ou deux grains pour la route ! Et une fois de plus, il semblerait que notre bonne étoile est avec nous : au fur et à mesure que nous nous approchons du but, les nuages se dissipent et laissent place à un chaud soleil méditerranéen. On n'en peut plus, l'envie d'arriver est telle que les derniers kilomètres nous semblent une éternité. Mais finalement, nous rentrons en ville. Plus que quelques balises rouge et blanche à pister et nous serons sur la plage ! Et la voilà ! Au bout de la rue, on distingue déjà les palmiers, plus que quelques dizaines de mètres, on passe devant la fameuse fresque dédiée au GR10 et nous y sommes. D'un pas décidé nous traversons la plage au milieu des touristes, mais sans courir, nous ne sommes plus pressés maintenant. Et enfin, comme nous étions partis les talons dans l'océan Atlantique, nous posons la pointe de nos chaussures dans la mer Méditerranée.

 

Nous avons traversé les Pyrénées !

 

J28 4671

 

 

PS : Je n'en dirai pas plus sur notre arrivée, il n'y a pas de mots ni de photos. Nous gardons cela pour nous pour l'instant. Cependant, je prépare un livre que j'ai l'ambition de publier. Si j'y parviens, j'y raconterai cette après-midi unique ainsi que de nombreux autres détails que je n'ai pas pu mettre sur ce blog.  

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 11:02

J27 4635 On a mis le réveil tôt ce matin : 6h30. D'une part parce que la journée est une fois de plus longue (37 km à vol d'oiseau !), mais surtout car nous n'avons pas envie de nous faire surprendre par des passants, voire la police, pour avoir dormi dans un lieu publique. Le réveil est un peu douloureux après les évènements de la nuit. Visiblement, Ben a mal dormi, il nous annonce qu'il ne nous suivra pas aujourd'hui, il a besoin de repos, il marchera, mais à son rythme. Je pense que la journée d'hier lui a fait un peu mal : sur le GR10, il n'avait pas l'habitude de faire de si longues étapes. Nous nous quittons après avoir plié nos affaires et rempli nos gourdes. Il est temps désormais de se trouver un petit déjeuner avant d'entamer la grimpette au Roc de France. J27 4637 On est obligé d'attendre 7h30 que les boulangeries ouvrent et c'est avec deux croissants et deux pains au chocolat dans le buffet que nous démarrons. Ça monte sèchement dès le départ : il faut sortir de la vallée du Tech et c'est pratiquement 1200 m de dénivelé qui nous pendent au nez jusqu'au sommet du Roc de France. Après une demie-heure de grimpette dans la végétation maintenant méditerranéenne, nous soufflons au premier point de vue sur Amélie et le Canigou au fond. 9a fait un bien fou de marcher à la fraîche ! En plus nous montons sur le versant Nord, ce qui va nous permettre de faire toute la matinée plutôt à l'ombre.  

Le chemin est agréable et ombragé et monte progressivement sans effort, nous marchons bien. Environ une heure plus tard, vers 9h30 nous sommes en vue de Can Felix, une grand ferme fortifiée bien connue des lecteurs des guides de Véron. En effet, pendant longtemps, le trajet de la HRP traversait la propriété de M. Felix, ce qui avait pour conséquence de l'énerver franchement et bon nombre de randonneurs, dont Véron lui même, ont eu maille à partir avec ce charmant bonhomme. J27 4638 Du coup, Véron préconisait d'être le plus discret possible en traversant le champs, jusqu'au jour où Sieur Felix barricada complètement sa ferme, coupant par la même occasion le chemin de la HRP. Mais heureusement, récemment un nouveau chemin a été tracé qui contourne amplement la baraque. Bref, tout s'est arrangé. Nous faisons donc une petite pause au frais avant de passer sous la maison. Un robinet fort à propos nous permet de nous abreuver et de remplir nos gourde déjà bien entamées. Nous sommes en gros à la moitié de la montée et nous avons mis 1h30 pour gravir les 600 premiers mètres de dénivelé, un bon rythme !  

Nous rejoignons la crête qui va nous permettre d'arriver au sommet, la végétation change drastiquement, nous sommes dans un sous-bois de montagne avec les chênes et les châtaigniers qui laissent peu à peu la place aux hêtres. J27 4643 Dans les trouées, nous voyons le Canigou qui nous surveille, dominant le paysage de sa masse imposante. Enfin, après 3h30 de montée, nous voilà sur la crête du Roc de France. Nous laissons les sacs au pied des rochers et finissons d'escalader le sommet. L'endroit grouille de fourmis volantes et nous ne restons que pour la photo. Nous profitons de notre pseudo dernier tranche de vraie montagne car à partir de maintenant et jusqu'à la fin de la journée, notre étape n'aura plus rien d'amusant. Véron le précise dans son guide, c'est sûrement l'étape la moins intéressante de la traversée, et nous pour corser le tout, on va la doubler ! Ce qui fait qu'à midi, quand nous empruntons la piste côté espagnol, nous ne sommes qu'à un tiers (en temps et en distance à vol d'oiseau) de notre journée.  J27 4642 Nous disons au revoir au Canigou en espérant que la météo nous le fera apercevoir demain matin et pour la dernière fois de notre HRP. A partir de maintenant, il nous reste pas moins de 27 km, quasi exclusivement de piste et de route, l'étape maudite ! Le soleil tape fort, très fort et la piste n'est que partiellement ombragée. Quand bien même, un vent du sud chaud et sec finit de nous déshydrater. Nos réserves d'eau s'amenuisent à vue d'oeil. Nous comptons sur l'établissement de Las Salinas un peu en contrebas de la piste pour refaire le plein. Manque de chance, il est fermé, mais nous faisons quand-même une pause car il est 13h00 et notre ventre nous supplie de la remplir. On serait bien resté là à l'ombre des pins faire la sieste pour éviter le cagnard espagnol, mais la route est encore bien longue et de toutes façons, "on n'est pas d'là !"J27 4644 La reprise est rude, on commence à en avoir notre dose de cette piste bétonnée qui fait vibrer nos bâtons de rando de manière très désagréable. Il fait de plus en plus soif. La piste descend pour contourner le Puig del Faig et s'aplanit pour rejoindre le Coll de Lly. On retrouve un petit chemin de sous bois qui nous amène à 15h30 à Las Illias. On se pose dans l'auberge pour refaire le plein de nos gourde et boire un coca. Un gros patou traîne autour du bar, celui-ci est calme, ce sera le dernier de notre traversée. 

En temps normal, l'étape se termine ici ; nous, nous ne sommes qu'à la moitié de notre journée, alors qu'il est 16h00 quand nous entamons les virages de la route qui monte à Super Las Illias. C'est la dernière montée de la J27 4647 journée digne de ce nom. Sur le plateau, nous croisons un groupe de VTTistes qui se fout un peu de nous en nous voyant un peu hagards au pied d'un arbre en train de prendre une barre de céréale, et qui se fout un peu moins de nous quand on leur explique qu'il y a 27 jours on était sur la côte Basques et que ce soir on sera après le col du Perthus. 

 

La piste est morne et monotone mais le trajet est soudain pimenté par un petit panneau qui nous indique que nous allons traverser sur quelques kilomètres un camps de naturistes babacool. Malgré le panneau officiel qui interdit toutes sortes de choses, noous trouvons un petit pannonceau qui indique que la "randonnue" est autorisés pour les randonneurs du GR10 (et de la HRP) J27 4649. Pour faire bonne figure, nous enlevons nos T-shirts. Au bout de 5 km, n'ayant pas vu le coin d'une fesses à l'horizon, nous nous rhabillons. Il est 17h00. La suite du trajet est une longue piste ennuyeuse interrompue un peu avant d'arriver au Fort de Bellegarde par un sentier coupant un long virage dans la garrigue. Pourtant, l'excitation est là malgré la pénibilité du chemin : demain sera le grand jour, le jour de l'arrivée ! Vient alors le problème du couchage de ce soir, nous avons prévu de nous arrêter au col du Perthus, mais en pleine ville, il ne sera pas aisé de trouver un endroit calme pour dormir, d'autant plus que le Perthus est loin d'être un endroit calme ! Nous prenons donc la décision de manger au Perthus et de continuer sur la route de l'étape de demain jusqu'à trouver un endroit pour dormir. Il est 19h00 quand nous débarquons dans le village frontière. J27 4650 La claque est moins violente qu'au Pas de la Case, mais ça fait toujours bizarre de se retrouver dans cette effervescence malsaine d'achats compulsifs. Une fois de plus, ce qui sauve le village de notre point de vue, c'est la présence d'une multitude de restaurants en tous genres. Nous optons pour un kebab frites pour ne pas perdre trop de temps. Nous passons au supermarché pour le petit déjeuner de demain et pour le repas de midi (le repas du soir sera bien entendu un resto à Banyuls !). Le soleil s'est couché quand nous repartons. C'est la première fois de notre traversée que nous marchons après le repas du soir ; d'habitude, c'est sous la tente et au lit ! Je ne vous cacherai pas que c'est dur de repartir comme ça, mais l'adrénaline nous pousse à raccourcir au maximum l'étape de demain, histoire d'avoir un maximum de temps pour profiter de la plage ! 

 

Il commence à faire sombre et nous mettons nos frontales, moins pour voir que pour être vus, car bien qu'il n'y ait pas une circulation terrible, autant ne pas se prendre une voiture dans un virage à une journée de la fin ! Nous marchons une petite demie-douzaine de kilomètres jusqu'à passer sous l'arche qui marque l'entrée du Mas Reste. Sur la gauche de la route, il y a un pré qui semble plutôt plat : c'est là que nous dormirons pour la nuit. Pas la peine de monter la tente, il ne pleuvra pas et la température est parfaite pour une nuit à la belle étoile. En passant la clôture, Nico se prend une châtaigne qui résonnera longtemps dans son corps : le pré est peut-être occupé... Il est aussi couvert de chardons très secs qui se plantent dans tout ce qui les touche et passent même au travers de nos fins matelas en mousse. Il nous reste à régler le réveil pour demain, le jour du sacre : 5h30 ! On décide de partir de nuit histoire d'arriver le plus tôt possible. De toutes façons, l'excitation aidant, il ne sera pas trop difficile de se lever !

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6 février 2012 1 06 /02 /février /2012 13:28

J26 4607 Le ciel s'est bien dégagé cette nuit, il a fait frais. Nous n'avons pas entendu Ben partir pour le sommet, il a du décoller bien tôt pour voir le lever du soleil. Les deux autres sont toujours en train de dormir quand nous nous levons à 7h00. Un petit dèj' à la fraîche et on plie bagage vers les 8h15. Une demie-heure plus tard, nous nous arrêtons pour contempler le sommet du Canigou ainsi que le chemin d'approche. Mais pas de pression aujourd'hui, les sacs sont vides : nous n'avons que le repas du midi. En effet, si tout va bien, nous serons à Amélie-les-Bains ce soir où nous nous ferons un bon resto et où nous ferons les courses pour la toute fin de notre périple. 

 Un petit kilomètre après le départ de la cabane, nous commençons à avoir une vue plus détaillée de la suite des évènements, c'est-à-dire, l'ascension du Canigou ! Le chemin monte en lacets pendant 40 min au milieu des éboulis et se profile de plus en plus clairement au dessus de nos tête, la fameuse cheminée du Canigou qu'il va falloir affronter. J26 4608  J26 4611 Elle peut paraître assez impressionnante au premier abord la bougresse, d'ailleurs, la première fois que je l'ai empruntée, j'avais un sac plus gros que celui que j'ai aujourd'hui et ce ne fut pas une partie de plaisir ! Elle consiste en un grand escalier de pierre, proche de la verticale bordé par deux parois qui s'élancent jusqu'au sommet. Il est  plus prudent de se servir de ses mains pour grimper, mais ce n'est pas non plus de l'escalade à proprement parler : nous n'avons utilisé qu'une main, J26 4613 la deuxième tenant les bâtons de rando. Bref, c'est une portion très divertissante si l'on n'est pas trop chargé et que l'on ne craint pas le vide. En 15 min tout au plus nous avons plié l'affaire en accédant au sommet du mythique Canigou. 

 

 Au sommet, on est happé par l'immensité de la vue à 360°. Nos regard se tournent de concert vers la même direction : l'Est. Elle est là, à l'horizon, comme un miroir d'étain, dans un sfumato cher à De Vinci, la Méditerranée ! Enfin, pour la première fois depuis Hendaye, nous avons l'absolue certitude d'avoir avancé pendant ces 25 derniers jours, nous avons l'absolue certitude que dans deux jours nous irons la toucher ! On en a les larmes aux yeux. Ben est là aussi, il nous apprend qu'il a raté le lever de soleil à 10 min près et depuis trois heures, il nous attend, contemplatif. Du coup, nous sommes les deuxièmes et troisièmes de la journée à admirer la vue du haut des 2784 m de la montagne sacrée des Pyrénées Orientales. J26 4621 On ressent presque la courbure de la Terre en regardant l'horizon du côté Ouest. On voit quasiment jusqu'à l'Aneto ! Nous avons sous nos yeux pratiquement nos deux dernières semaines de marche. Tant de montagnes et de vallées traversées, c'est à peine croyable de réussir cela avec seulement deux jambes et deux pieds... On voit parfaitement le Carlit où nous étions il y a trois jours, la Cerdagne se devine et l'on peut voir le plateau que nous avons traversé hier dans le brouillard. 

 

Un autre type nous a rejoint, suivit de Marcelo et de sa copine, puis encore un autre gus. Nous les 7 premiers vainqueurs du Canigou de la journée par son accès Sud (il y en aura plusieurs centaines aujourd'hui, mais arrivant principalement par le chemin Nord, facile, qui vient du refuge des Cortalet) posons pour la postérité.J26 4622 

 

Il va bientôt être temps de repartir, il fait assez froid d'ailleurs avec le vent, Ben est frigorifié d'être resté tout ce temps inactif. Les premiers randonneurs venant du Nord font leur apparition déjà et il ne faudra pas attendre bien longtemps avant que ce soit une émeute sans nom. Je jette un dernier coup d'oeil sur notre chemin de monté et nous nous lançons dans la longue descente vers le chalet des Cortalets. Nous ne serons resté finalement qu'une petite demie-heure au sommet du Canigou, demie-heure qui m'aura paru une éternité d'extase. C'est donc remonté à bloc et le sourire aux lèvres que nous croisons les touristes en short et tongs peiner dans la montée. J26 4625 La descente suit une crête un bon moment avant de plonger sur le refuge, nous y allons bon train. Au refuge, nous nous posons pour prendre un coca rituel, Ben arrive peu après et reste faire une petite pause lui aussi. Nous reprenons de l'eau au robinet avant d'entamer la descente par une longue piste de 5 km. A mi-chemin, Ben nous rejoint de ses longs pas. Vers 12h30 nous faisons la pause casse-croûte au départ du chemin des balcons du Canigou. C'est un chemin que nous allons emprunter sur quelques 10 km et qui fait le tour du Canigou à altitude quasiment constante, bref, du plat pendant 2 h ça va nous donner l'occasion d'accélérer un peu ! J26 4629 Pendant la pause repas, on se fait copieusement insulter par un randonneur qui trouve qu'on lui bouffe un peu trop son espace vital en mangeant sur le chemin. Ça nous rappelle que pendant que nous passions un mois hors du temps et du monde, ce dernier ne s'était pas arrêté de tourner et était toujours aussi plein d'imbéciles. 

 

On avance bien sur ce chemin, Nico devant, Ben au milieu et moi derrière qui prend quelque photos de temps en temps. Les parties boisées sont un peu plus difficiles car la dernière tempête a fait tomber de nombreux arbres sur le chemin qui n'ont pas encore été enlevé. J26 4631  Alors on enjambe, on se recroqueville, on se fait fouetter, mais on passe. La moyenne en est par contre franchement ralentie car les arbres sont nombreux. Deux heures après le départ du chemin, nous accédons à la cabane de l'Estanyol et sa fontaine où nous faisons une pause. Un gentil cheval blanc nous accueille. Nous remplissons nos gourdes et faisons un point avant la seule montée de l'après-midi. En effet, depuis le sommet du Canigou et jusqu'à Amélie-les-bains ce n'est que de la descente : 2600 m de dénivelé négatif ! Mais pendant la prochaine heure, ça va grimper un peu et je sens que les jambes de Nico le démangent, ça va booster ! J26 4632 Ça sera un bon test pour ce pauvre Ben qui commence à tirer un peu la langue, il nous suit mais on sent qu'il ne lui en faut pas trop de plus pour décrocher. Et bim ! Nico est partit comme une fusée, je le suis au train et Ben derrière, je souffle comme un boeuf, Ben est au bord de l'explosion en vol quand nous arrivons 35 min plus tard au col de la Cirère juste au dessus des mines de Batère. On aura mis une demie-heure de moins que prévu par le guide ! On se pause pour éviter à Ben de tourner de l'oeil. On lui avoue qu'on voulait voir ce qu'il avait dans le ventre, il a passé l'exam haut la main ! 

 

Mais nous sommes encore loin d'être arrivé à Amélie, il est 16h20 et il nous reste pas moins de 15 km à parcourir. On se dirige sur la piste vers la tour de Batère, mais je dois m'arrêter soudain : une ampoule s'est formée lors de notre course ou avant, mais elle vient d'exploser, juste sous le pouce. J26 4633 Pas grand chose à faire, on met une compresse et un bandage serré pour que ça ne frotte pas trop et je serrerai les dents en comptant sur mes endorphines pour atténuer la douleur. On en profite pour annoncer à Ben qu'il nous reste au moins deux heures de marche et pour lui demander s'il est d'accord pour continuer : "Vous êtes des tarés vous ! Vous vous arrêtez jamais, non ?!! " "Be, non...!" Et il nous suit.  

 On galère un instant dans un bois en se trompant de piste, mais les deux heures de marche se passent et nous déboulons au pied de la descente infernale dans un bois de châtaigniers sur l'envers de maisons qui n'étaient pas là la dernière fois que je suis passé. Enfin, on prend pied sur le goudron  du boulevard de la petite Provence. Il est temps de se diriger vers le centre ville pour trouver à manger. Ce soir ce sera pizza ! Des énorme pizzas mangée en un clin d'oeil sur le trottoir, devant les passants un peu gênés. Il fait une chaleur monstre dans le fond de la vallée et ça tombe bien car nous allons dormir à la belle étoile. 

 

Mais dormir dans Amélie n'est pas une mince affaire, il y a des gens partout et très peu de place discrète où dormir. J26 4634 Et il ne faut pas compter sur du confort. On trouve néanmoins un square un peu à l'écart du centre, à côté de la piscine, où l'herbe est assez présente pour faire un matelas un peu moelleux. Il y a en plus un robinet d'eau potable à l'arrière du bâtiment qui nous sera bien utile pour refaire le plein avant de partir demain matin. Nous nous couchons donc au pied d'un grand cèdre, là où l'herbe et la plus drue et verte. Ça aurait dû nous mettre la puce à l'oreille, mais la fatigue nous recommandait de ne pas réfléchir plus loin que "attention aux crottes de chiens". Pourtant, au milieu de la nuit, je me fait réveillé par un bruit de cigale assez fort, le temps que je comprenne de quoi il retournait, nous nous faisions doucher par l'arrosage automatique municipal. Je ne suis jamais sortit aussi vite d'un sac de couchage ! En 30 sec nous avions enjambé la rambarde qui nous séparait de la terrasse de la piscine avec armes et bagages. Au sec mais sur le béton, nous avons fini notre nuit tant bien que mal. 

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22 janvier 2012 7 22 /01 /janvier /2012 15:28

J25 4598 On va pas partir tôt ce matin... On a été prendre notre petit dèj' dans le refuge et tout de suite, on est moins pressé. On partira vers 8h45 sous un ciel bas et lourd pesant comme un couvercle. Les nuages sont juste au dessus de l'altitude du refuge, mais dans un premier temps, nous descendons vers une petite station de ski et son immense parking. Il commence à tomber des gouttes, on s'arrête pour se couvrir avant la brusque remontée au porteil de Morens qui nous permet de retourner en France pour un bon moment. Il faut faire attention ici à se diriger vers la droite (Ouest-Nord-Ouest) plutôt que plein Nord vers le porteil de Mantet pourtant plus alléchant. On se retrouve une nouvelle fois sur les steppes. Le paysage est un peu déroutant : J25 4599 après des jours de montagne, de montées et de descentes, on se retrouve sur du plat et l'on perd ses repères. Les nuages se tassent sur la frontière et pour une fois, il fait beau en France.

 

On navigue à vue sur ce grand plateau pelé en suivant de loin en loin quelque cairns et parfois des balises. La dernière fois que je suis passé là, la météo était inversée : beau en Espagne et brouillard total en France, nous n'avions rien vu de la journée mais par chance nous ne nous étions pas perdu.  En effet, l'orientation n'avait pas été du tout évidente, une course d'orientation pour trouver les balises dans la purée de pois. Mais finalement nous étions arrivés au Pla Guillem sans trop savoir comment on avait réussi. J25 4600

 

Mais j'ai peut-être parlé trop vite... ! Il est 11h00 quand un assaut de stratus venu d'Espagne traverse violemment la frontière. La première ligne de vent et de lambeaux de brume nous fouette le visage. Nous nous étions déshabillés dans la monté du col mais désormais l'humidité reprend le dessus et nous nous recouvrons. Pendant une demie-heure, la bataille entre beau temps et nuages est équilibrée, pourtant, une attaque brumeuse plus violente que les précédente nous recouvre d'un coup. Sous le poids du nombre, le soleil a cédé et battu en retraite, nous laissant transis et égarés sur le plateau frontalier.

 

Pourtant, sous peu, nous le savons, il va falloir bifurquer vers la gauche pour prendre le chemin du tour des réserves naturelles sur la crête de Rotja et quitter le fil de la frontière. Nous avons des balises rouges et blanches de temps en temps, on suit une sente à moutons qu'on croit être le chemin. La pause de midi se fait derrière quelques rochers pour se protéger du vent qui reste très frais. Décidément, je ne verrai jamais le paysage de cette étape ! Il va falloir que je revienne encore une fois !

 J25 4601

Nous n'avons aucun repères visuels pour attester de notre avancée, pourtant, il nous semble marcher assez vite, la température ambiante aidant. Pourtant, finalement nous tombons sur une piste : nous allons pouvoir nous repérer ! Je m'en souviens désormais, la dernière fois nous avions aussi tergiversé à la vue de cette piste, mais en regardant la carte, il n'y a pas de doute possible, nous sommes au col des Roques Blanches. Et en effet, tous les rochers du coin sont d'un blanc immaculé.

 

Pas de doute possible, il faut traverser cette piste et prendre un chemin en face. Mais où est le « en face » dans le brouillard ? On tourne un peu, on remonte et redescend la piste mais finalement, c'était bien « en face » en gros du chemin par lequel nous étions arrivés qu'il faut repartir. Autre bonne nouvelle, nous sommes à la moitié de la journée ! Et jamais deux sans trois, un peu plus loin sur le chemin je me rend compte que mes intestins ne m'en veulent plus et ont décidés de se comporter en gentlemen ! Ça fait un bien fou !

 J25 4602

Il est dans les 15h00 quand nous arrivons enfin sur une piste dont j'ai souvenance et qui mène rapidement au Pla Guillem. On ne voit rien, mais je reconnais la zone de protection de la flore, interdite aux marcheurs ainsi que les tranchées laissées par le passage répété de 4x4. Tandis que nous avançons entre ces mottes d'herbe et de terre, nous entendons au loin dans le brouillard le lourd aboiement d'un chien, surement un patou qui protège son troupeau de moutons et qui prévient de ne pas approcher. On entend de mieux en mieux les cloches des moutons, on doit se rapprocher du troupeau, et ce n'est pas un mais deux aboiements distincts qui percent le brouillard. Nous n'avions plus eu affaire aux patous depuis les cabanes d'Ansabère. Nous traversions un troupeau le matin, aussi dans le brouillard et un patou perché un peu plus haut que nous nous intimait l'ordre de partir au plus vite, mais sans trop d'agressivité. Aujourd'hui, le troupeau est assez loin et de toutes façons, nous l'avons dépassé. Pourtant les aboiements ne diminuent pas et semblent se rapprocher. On scrute à travers la brume, mais on ne voit pas à dix mètres...

 

Quand soudain, sortis de nulle part, deux énormes molosses blancs fondent sur nous tous crocs dehors ! Panique à bord. On se retourne, les bêtes stoppent à 4 m de nous mais continuent d'aboyer au diable. On leur gueule dessus, on les menace de nos bâtons de rando, faible remparts contre deux fois cinquante kilos de muscle en furie. Ils reculent un peu, nous reprenons notre avancée en jetant un œil par dessus notre épaule tous les 2 pas. Ils r-attaquent ! On se retournent, ils sont à un mètres de nous et leurs gueules claquent à quelques centimètres de nos mollets. J25 4603 On a le cœur qui bat à 200, l'adrénaline a remplacée notre sang, on transpire à grosses gouttes. On recule comme ça pendant 10 min sur un terrain semé de mottes et de pierres. Surtout ne pas tomber. Chacun tient en joue son chien avec ses deux bâtons, une fente en avant, tel l'escrimeur pour en faire reculer un. Ils ne nous lâcheront donc jamais ? Nous sommes à plus de 500 m de leur troupeau, ils font du zèle là ! Et c'est là que sur une touffe traitresse, en reculant, Nico trébuche ! Se faisant, il fait deux grands moulinets avec ses bâtons en poussant un cri, avant de se rattraper in extremis. Surpris et effrayés, les deux chiens s'enfuient. Nous sommes arrivés au bout du Pla Guillem. On ne saura jamais si c'est les cabrioles de Nico ou bien parce que nous étions arrivé au bout de leur territoire qu'ils nous ont lâché... On a les jambes un peu en coton quand on arrive sur la piste qui descend au refuge de Mariailles, on se repasse en boucle les dernier quart d'heure : on a eu chaud aux fesses, se faire bouffer à 3 jours de l'arrivée, ça aurait été pire que de se fouler une cheville !

 

L'heure de marche à descendre cette piste est d'un ennui terrible et pas moyen de couper cet immense virage qui nous fait face... On croise un bergère avec son border-collie qui nous explique la psychologie des patous : ces chiens sont élevé depuis leur naissance au sein d'un troupeau de moutons, ils ne savent même pas qu'ils sont des chiens, ils pensent être des moutons. Des moutons capables de défoncer un ours tout de même !

 J25 4604

Refuge de Mariailles en bas de la piste, 16h30, pas de pause, il nous reste dans les deux heures avant d'arriver à la cabane Arago où on espère passer la nuit sans avoir à monter la tente. Je n'ai pas grands souvenirs de la montée, si ce n'est qu'on a récupéré le GR10 et que nous sommes passés sous les nuages. On ne s'est pas mouillé aujourd'hui mais ce fut une des pires journées de notre traversée.

A la cabane, nous avons la mauvaise surprise de voir qu'il y a déjà 3 personnes dedans et vu la taille de la bâtisse c'est à peu près tout ce qui peut y rentrer ! Tant pis, on montera la tente. Il y a un point d'eau bien pratique juste à côté où nous tentons de nous débarbouiller. L'eau est glaciale et nous enlève des cris stridents, le tout sous le regard éberlué des trois occupants de la cabane.

 J25 4605

Après cette interlude revigorante, nous entamons les présentations. Nous avons donc affaire à Ben, qui fait le GR10 depuis 2 mois, un grand gaillard qui veut voir le soleil se lever au sommet du Canigou demain matin. Et il y a Marcelo et sa copine dont j'ai oublié le prénom. Marcelo est un géochimiste Brésilien et sa copine est Canadienne et fait des études d'anthropologie. Ils vont gravir le Canigou demain.

 

On passe une bonne soirée avec cette petite troupe autour d'un grand feu. Le ciel se dégage durant la nuit, il fera beau demain pour affronter le maître de la Catalogne française.

 

J25 4606

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14 janvier 2012 6 14 /01 /janvier /2012 17:18

 Réveil à 6h30, il a l'air d'avoir arrêté de pleuvoir... La nuit a été un peu mouvementée : on a dû se bastonner avec une souris qui en voulait à nos restes de provisions. Non pas qu'il y avait grand-chose à manger, mais le bruit incessant du petit animal au fond du sac de Nico nous empêchait franchement de dormir. Elle saute littéralement au visage de Nico quand celui-ci essaye de la sortir du sac, une belle frousse, mais au moins on peut dormir tranquille jusqu'au matin. 

Il ne pleut plus mais le temps est sacrément couvert : une fois n'est pas coutume on part avec les vestes de pluie sur le dos. On ne devrait pas avoir trop de problème d'orientation ce matin, on suit les balises rouges et blanches du GR10 qui passe devant la cabane. Ca descend sec dans les bois, le large chemin est raviné dans tous les sens et de gros blocs de granit glissants sont apparents ici et là. C'est facile mais ce n'est pas une raison pour ne pas faire attention. Depuis hier, on a une certitude : on va finir cette traversée, on va vaincre la HRP ! Alors ne nous foulons pas bêtement une cheville ici.

J24 4583La journée, je l'ai dit, s'annonce terrible : quelque 13h de marche sans compter les arrêts, on a mesuré sur la carte, cela représente 34 km à plat, ce qui est déjà énorme, mais quand on y rajoute 2000 m de dénivelé, là ça devient de la folie pure de vouloir faire ça en une journée. Deuxième challenge - et pas des moindre - trouver de quoi se ravitailler. Ce matin, on doit passer à Bolquère, qui est un relativement petit village, et nous sommes dimanche. La découverte d'une supérette ou d'une épicerie ouverte n'est pas assurée... 

Pour l'instant, il se met à pleuvoir, il y a du brouillard par intermittence et nous déboulons sor une piste. Est-ce le temps ou le fait de devoir suivre des balises qui nous endors le neurone ? Toujours est-il que nous continuons sur la piste qui descend, alors que le GR monte à droite vers les pistes de ski de Pyrénées 2000. Ca nous rajoute deux bons kilomètres... Joli les gars ! En plus, cette piste est d'un monotone ! Je m'ennuie ferme et il faut se coltiner les rares 4x4 et tracteurs qui se baladent. Au bout d'un moment, on regarde la carte en essayant de deviner notre position le moins approximativement possible. On en déduit d'après la pauvre visibilité que nous avons ainsi qu'à la topographie, notre position. On décide de prendre le prochain chemin sur la droite, mais très vite on le perd et on se retrouve dans un bois, derrière des maisons, enfin ! ais impossible de passer, elles forment une barrière infranchissable. On les longe vers la droite (qui se serait avéré être le Nord-Ouest si nous avions sorti la boussole, donc pas tellement la bonne direction à prendre...) et l'on tombe sur un parcourt santé. La sortie de ce bois maudit ne doit plus être loin désormais. Et en effet, 10 min plus tard, nous débarquons dans un lotissement qui s'avère être Superbolquère. On voit au loin le clocher de l'église de Bolquère entre les nuages qui commencent à se déchirer : il ne reste plus qu'à descendre sur le goudron. 

J24 4584 Nous trouvons une fontaine pour remplir nos gourdes et au centre du village, notre décidément très bonne étoile nous offre une petite supérette ouverte !!! On la dévalise ! Des Oranginas d'abords, à consommer tout de suite, mais sinon du pain, du jambon, du fromage, des gâteaux secs, de quoi tenir pour 3 jours jusqu'à Amélie-les-Bains. Alala ! Quand nous serons là-bas, le plus dur sera fait, il ne restera qu'à se laisser glisser vers la mer ! Mais avant ça, il faut déjà que nous arrivions au refuge d'Ulldeter ce soir, il est 11h00, il nous reste la traversée de la Cerdagne pour rallier le village d'Eyne, et ce n'est qu'à partir de là que les choses sérieuses vont commencer...!  Alors on reprend la route. le plus simple pour aller à Eyne est de suivre le goudron jusqu'au col de la Perche où passe la nationale, de la traverser et de suivre la D33 jusqu'au village. Mais bien sûr ce n'est pas ce que nous allons faire ! On ôte les K-ways et on se lance dans une traversée de la Cerdagne à travers champs, avec en point de mire la vallée d'Eyne, pentue et rectiligne. Et c'est parti dans les herbes hautes ! On avance à bon rythme, à peine ralenti par les clôtures et la voie ferrée du petit train jaune. On ne pousse pas trop vers l'Ouest pour éviter d'avoir à traverser le ruisseau : on vise une trouée dans le bois en face. De là, on récupère très vite un balisage jaune et rouge du tour de Cerdagne que l'on suit jusqu'à la sortie de la forêt. Ensuite, on coupe à travers les prés jusqu'à Eyne où l'on fait notre pause de midi. J24 4585 On tremble, on salive en ouvrant le sachet de jambon, on revit !

Il est 13h00 tapante à l'horloge de l'église quand nous repartons. Dans l'itinéraire de la HRP "normale", c'est-à-dire celle de 42 étapes décrites par Véron dans ses guides, le tronçon Eyne - Refuge d'Ulldeter constitue une étape à part entière. Et nous nous la commençons à une heure de l'après-midi...! En plus, la crête frontière vers laquelle on se dirige est très réputée pour ses violents orages, d'ailleurs, la dernière fois que j'ai fait cette étape (la normale), on s'était fait saucer dès l'instant où on avait pris pied au col de Nuria et jusqu'au refuge d'Ulldeter, dans un brouillard tempétueux à couper au couteau. Et comme les orages arrivent plutôt en fin de journée en montagne, commencer une étape en début d'aprem n'est pas le meilleur moyen de se mettre à l'abri ! Enfin, nous verrons bien ! Pour l'heure, il nous faut monter les 1200 m de dénivelé jusqu'au col. 

Mais boulets que nous sommes, nous empruntons le mauvais chemin au départ d'Eyne et nous nous engageons sur le GR36 qui nous mène à Eyne2600, la station de ski. On enrage ! On trouve quand même un chemin qui part sur la droite et qui semble aller dans la direction de la vallée de Nuria. Mais le voilà qui redescend, le c** ! Ce serait un euphémisme de dire que nous sommes un peu énervés. On roule sur les pommes-de-pins qui tapissent le sentier, manquant de nous blesser : nous ne sommes pas pour ainsi dire dans une spirale positive ! Pourtant, au bout de 10 min le chemin prend pied sur une canalisation. On regarde la carte : oui elle vient de la vallée de Nuria ! Et comme ce genre de construction sont construite avec une pente minimum, on sait qu'on va pouvoir avancer rapidement. Je prend les devant et lance mes bras et mes bâtons loin devant moi, on accélère. 

On parcourt ainsi, sur le plat toute la première partie de la vallée et très vite on rejoint le chemin principal. Je ne pense pas que nous ayons perdu du temps dans cette affaire. On sort peu à peu de la forêt, le ciel est bien couvert, ce qui n'est pas très bon pour notre futur... En nous retournant, nous apercevons à l'horizon le Pic du Carlit où nous étions hier, à peu près à la même heure (et quasiment à son pied ce matin encore !). C'est peut-être la centième fois que je me le dis depuis trois semaines, mais c'est quand même dingue la distance que l'on peut parcourir avec des deux petites jambes ! J24 4586

Il y a du monde sur le chemin, c'est vrai que la vallée de Nuria, réserve naturelle de faune et de flore sauvage et magnifique, surtout au début de l'été quand elle est entièrement fleurie. Début août, il n'y a plus de fleurs, alors nous ne sommes pas détourné de notre objectif : arriver le plus tôt possible au col. On double un nombre incalculable de personnes, on monte à toute berzingue. Le dernier groupe de la journée se fait déposer un peu avant d'arriver au col. Au passage on leur rend une paire de lunettes qu'ils avaient abandonnées à leur précédente pause au Pla de la Beguda. Nous nous y étions arrêté aussi pour remplir nos gourdes dans le ruisseau et pour sortir nos vestes de pluie et nos sur-sacs, il commençait à pleuvoir ce qui n'était pas bon signe pour la suite. 

J24 4587 Nous arrivons à 16h45 au col de Nuria, avec une demie heure d'avance sur le timing du guide. Toujours selon le guide, il nous reste encore près de 4h de crêtes avant d'atteindre le refuge, ce qui nous ferait arriver dans les 20h30/21h00... Soit ! Ne traînons pas alors ! Et nous voilà jouant les funambules sur la crête frontière, aux prises avec un vent violent qui nous lacère le visage. Mais au moins, il a l'avantage de faire partir tous les nuages, et bien qu'au soleil dorénavant, nous gardons nos vestes. Nous évoluons désormais sur du quasi plat dans un paysage de steppe, de cailloux et d'herbe rase. Cette fois, le paysage est dégagé et je peux enfin voir les splendides panoramas que j'avais manqué la première fois. 

J24 4588 J24 4590

Comme souvent dans les Pyrénées, il fait beau en Espagne et couvert en France. Nous nous dirigeons au pas de course vers le sommet de la journée : le Pic Nou Fonts, 2861 m ; un gros tas de cailloux sur lequel le chemin monte en ligne droite en suivant la frontière. A mi-pente, nous chassons un troupeau d'isards. Il y en a donc jusque dans les Pyrénées Orientales ! Au sommet, c'est la photo rituelle, mais nous ne traînons pas, le vent glacial nous pousse vers la descente et le reste du trajet. 

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La frontière est en fait une succession de montagnes russes qui ne cessent de casser le rythme : le chemin suit exactement la frontière, donc la topographie et ne s'embarrasse pas de faire quelques virages pour atténuer la pente ! Au pied du Nou Fonts, nous retrouvons le GR11, que nous allons suivre désormais jusqu'au refuge. Après la rude montée au Pic de la Fossa del Gegant, le paysage s'aplani un peu et nous pouvons accélérer. 

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On passe au dessus de vallées inconnues, à la fois du côté français et ibérique, des vallée qu'en moins de 15 min nous avons virtuellement traversées et que nous ne connaîtrons peut-être jamais plus en profondeur... C'est le prix à payer pour une traversée ; comme son nom l'indique, nous ne faisons que traverser, nous n'explorons pas, nous survolons. Ce serait le travail d'une vie que de vouloir parcourir toutes les vallées des Pyrénées !

J24 4596 Après le Pic de la Vache, entièrement fait de marbre, nous arrivons enfin à la combe qui tombe côté espagnol et où mes souvenirs de la dernière fois refont surface. Je me souviens que dans la tempête nous chantions à tue-tête mon frère et moi et sautant dans la moindre flaque d'eau, trempés que nous étions jusqu'aux os. Aujourd'hui, le temps est beaucoup plus clément et l'on aperçoit déjà le col de la Marrana synonyme de descente sur le refuge. Il est 18h55, il reste 5 km de descente à faire : nous serons au refuge d'Ulldeter vers 20h00 en ayant plus d'une heure d'avance sur le temps indiqué par notre cher Véron ! 

 Refuge d'Ulldeter, 2220 m d'altitude, nous voilà, pile dans les temps ! J24 4597 Nous rentrons dans le refuge, et faisons la popote dans la véranda. Nous demandons au gardien où nous pourrons poser notre tente pour la nuit, mais il nous explique que le camping sauvage est interdit.  On lui dit que ce n'est que pour la nuit, demain à 8h00 il n'y a plus rien, mais il prend un peu la mouche... Il nous explique que ce n'est pas lui qui décide et que si nous tombons sur des gardes nous aurions une amande. Soit on prendra une amande... On ne l'importune plus, on fini notre repas et avant que la nuit soit complète, on monte notre tente à la frontale, derrière un gros rocher, à l'abri des regards et au beau milieu de bouses de vaches ! Il n'y a pas eu de gardes...

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12 janvier 2012 4 12 /01 /janvier /2012 17:04

J23 4558 Quelle joie de se réveiller tôt au milieu des alpages par un beau matin d'été ! Surtout quand dans lesdits alpages broutent gaiement un bon nombre de gentils moutons ! Ils sont loin maintenant, mais durant toute la première partie de la nuit, ils étaient tous agglutinés autour de la tente comme si l'espace manquait et la réminiscence de ces cloches qui sonnaient à nos oreilles nous hantera longtemps. 

Mais ne nous attardons pas plus sur cet incident, il est 8h00, la journée qui nous attend est belle et augure du meilleur, bien que sur le papier elle puisse faire un peu peur : 25.4 km mesuré sur la carte donc équivalent à du plat pour aller jusqu'au lac des Bouillouses, auxquels il convient d'ajouter au minimum le Pic Carlit, plus haut sommet des Pyrénées Orientales et sommet absolu de notre traversée : 2921 m d'altitude ! Ce qui n'est pas rien, surtout quand on commence 1000 m plus bas à 1920 m au col du Puymorens ! Bref, une petite journée comme on les aime. Surtout que ce matin, effet Pas de la Case ou pas, on a une patate d'enfer ! On galope comme le troupeau de chevaux qui n'arrête pas de nous suivre depuis qu'on est passé devant les mines désaffectées. Enfin tout est relatif quand même ! Au moins on n'a mal nulle part. 

On arrive donc tranquillement au col du Puymorens, prêt à affronter les 1000 m++ de dénivelé qui nous attendent. On est relativement content, les 500 premiers mètres de dénivelé sont étalés sur 17 km, par contre, les 500 suivant se passent en 1 km (ce qui fait de la pente à 50 % ça !). On passe la clôture barbelée et on monte tout droit dans la pente pour rejoindre une piste qui surplombe le col et qui doit nous mener en pente douce jusqu'au pied du Port de Lanous.  J23 4559 Il y a des traces fraîches dans la boue devant nous, l'occasion de se mettre en chasse et de prendre un rythme rapide ? En effet, au virage qui nous engage dans la vallée de Cortal Rosso, nous apercevons devant nous deux silhouettes loin sur le chemin. Parfait ! La chasse est lancée, ils n'ont aucune chance, on pète la forme ! Peut-être trop même... En moins de 15 min on les a rattrapé ! Déception par contre, ce sont deux papy/mamie qui se baladent tranquillement, le challenge vient d'en prendre un coup...

Un grand replat herbeux (marécageux oui !) nous fait face, la piste le contourne par l'Ouest et va mourir au pied d'une conduite d'eau. Nous coupons par l'Est en direction du col de Lanous qui nous tend les bras. On s'embourbe mais on prend pied sur la canalisation qu'on suit un peu avant d'entamer les 300 m de montée pour le col. Le chemin est raide et en partie éboulé dans le ruisseau en contre bas, mais ça passe bien, je n'ai pas le souvenir d'avoir trop souffert. 

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Col de Lanous, 11h30. Il pourrait paraître que nous nous sommes traîné : 3h30 pour faire 12 km, même pas du 3.5 km/h, minable ! Déjà, on enlève une bonne demie heure de pause. On monte à 4 km/h ce qui est plus raisonnable. On peut même augmenter la moyenne en ne regardant que les 10 premiers kilomètres pour lesquels nous n'avons mis que 2h (du plat !) soit du 5 km/h ! Pour les 2 derniers kilomètres, en montée, il y avait 300 m de dénivelé à grimper : une heure, c'est la moyenne. Col de Lanous donc, on est bien, dans le vent, au soleil, on se fait prendre en photo par un groupe de randonneurs qui viennent en sens contraire. Et on a une magnifique vue sur le Carlit ! Ce qui fait peur, franchement ! Non mais on a beau le prendre dans tous les sens le gus, et même savoir en gros par où il faut passer, ça fait quand même vachement pentu... Un petit graph pour vous expliquer : cliquez sur l'image de droite en dessous. 

J23 4563 J23 4563 - Copie

Bon, comme dirait l'autre, c'est au pied du mur, qu'on voit le mieux... le mur !  Alors allons-y à ce mur, on mangera au pied. Evidemment, sinon ça serait pas drôle, il faut descendre, 250 m, pour tout remonter en face avant d'arriver au départ du Carlit. Et bien ça nous prendra 1h15. Remarquez au passage comment j'élude cette partie de la rando dont je ne me souviens quasiment pas. Bref, visiblement comme si de rien n'était,  on est passé près de l'étang de Lanous et on est remonté jusqu'à l'étang dels Forats, au début du trait rouge, où on s'est posé à l'abri du vent pour manger.  On recommence à voir du monde sur les chemins, d'ailleurs un petit groupe est en train de dévaler la raillère du Carlit et nous permet de voir plus précisément le tracé du sentier. Et bien croyez-moi, même au pied du mur, ça reste très impressionnant : le mur reste un mur. J23 4564 On prend du temps pour bien sentir la pression monter en nous et pour se requinquer. 1h30 de pause. Le point positif, c'est qu'on va monter quasiment à vide, on est en train de manger notre dernier repas de midi du sac de ravito qu'on avait récupéré au Port de la Bonaigua ( HRP - J18 : Refuge de Colomer - Cabane d'Airoto ). Demain, on passe à Bolquère ou Font-Romeu et on croise les doigts pour qu'il y ait quelque chose d'ouvert car ça sera dimanche... Au pire, il nous reste quand même de quoi survivre : comme le saucisson et les chips nous dégoûtent de plus en plus, on a de plus en plus de mal à finir nos rations à chaque repas. Du coup, on a pris du retard et il nous reste un saucisson entier ainsi qu'un paquet de chips en rab', plus une bonne quantité de barres de céréales et de gâteaux secs. 

J23 4566 14h30, c'est l'heure de repartir ! On prend une bonne inspiration en passant à côté d'un petit poulain mort, ah non il dormais ! Bon on l'embête pas plus, sa mère nous regarde d'un drôle d'air... Et bim, on se prend un mur ! En pleine tronche ! Ca nous apprendra à ne pas regarder devant nous ! C'est parti. Un pas après l'autre on entame l'éboulis, le vent qui se renforce nous pousse dans le dos. En fait ça se fait, à un rythme de sénateur c'est vrai, mais ça se fait. On rentre dans la cheminée, le vent se renforce et par bourrasque nous déséquilibre en soulevant de puissants tourbillons de poussière. On les vois monter depuis le bas de la pente, on a alors le temps de se tourner un peu et de fermer les yeux. C'est passé - jusqu'à la prochaine - on continue. Je me retourne pour prendre une photo, on a l'impression d'être en avion : l'étang de Lanous et son col semble loin, tout petits et tout plats !

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On déboule sur le petit épaulement sous le sommet, la grimpette est bientôt finie ; maintenant c'est 5 min où il faut mettre un peu les mains et on débarque au col entre les deux sommets : le vrai à droite et un un peu plus bas avec une croix à gauche. On pose les sacs et on fini en légèreté. On est au sommet de notre traversée des Pyrénées !! La vue est à se damner à 360° ! On regarde la montre et on n'en revient pas : on n'a mis que 50 min pour monter ! On est heureux comme des Papes, la seules petite déception qui n'en est pas une c'est qu'on ne voit pas de petits reflets à l'horizon qui pourraient trahir la présence de la mer Méditerranée...! Ca nous aurait boosté, mais ça nous aurait aussi fait croire que nous sommes très proche du but alors qu'il nous reste au moins 5 jours et demi. Si proche mais encore si loin ! En revanche on voit parfaitement le majestueux Pic du Canigou ! Nous devrons être à son sommet dans 3 jours ! 

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Nous redescendons aux sacs car un mec arrive au sommet et met fin à notre contemplation. Au col, un gars qu'on avait pas vu monter est en train d'embarquer le sac de Nico... On tombe sur le cul ! Venir au sommet du Carlit pour se faire tirer son sac à dos ! Il a beau être plutôt vide, il y a toute notre vie là-dedans !! On demande au gus s'il a besoin d'aide en lui faisant remarquer gentiment que ce sac nous appartient. Le gars devient rouge comme une tomate en s'excusant platement : il a confondu le sac de Nico avec celui de son pote qu'on a croisé au sommet. En effet, ils sont bleus tous les deux. On leur raconte notre périple, ils s'étonne de la taille de nos sacs, on leur explique qu'ils sont vides car on a mangé tout notre ravito. Le fait que nous n'ayons pas mangé un seul fruit depuis plus de 3 semaines les laissent pantois. J23 4580 Alors pour la peine et aussi pour s'excuser de leur maladresse de tout à l'heure, ils nous offre chacun une pomme. On ne sait que dire, si ce n'est un petit merci qui ne reflète absolument pas la joie que nous procure ces cadeaux de rien et la reconnaissance que nous avons pour ces deux types. 

Nous entamons donc la descente vers le lac des Bouillouses l'âme légère. Il doit être dans les 15h30/16h00, dans 1h nous serons au barrage du lac. D'ici là, nous aurons traversé le "désert du Carlit", un endroit enchanteur fait d'une multitude de lacs et de bois, malheureusement lacéré par les chemins qui s'érodent sous les pas des (trop) nombreux randonneurs. On profite d'un ruisseau pour faire une petite lessive, la dernière datant du Pla de Boet ( HRP - J20 : Refuge del Prats - Pla de Boet). Le soleil aura juste le temps de sécher tout ça avant qu'on arrive aux Bouillouses, surtout si on se fait 1/2h de sieste au soleil ! On est bien. Pour une fois depuis des jours, notre corps ne nous inflige pas des douleurs atroces en fin de journée, la fatigue accumulée les jours dernier a disparu, il ne reste que la (bonne) fatigue de la journée, c'est tellement bon ! J23 4581 

Nous arrivons au barrage du lac des Bouillouses vers les 18h00, le bureau d'accueil et d'information vient juste de fermer, mais ses toilettes restent ouvertes et il y a une table basse et des fauteuils à l'extérieur, sous l'auvent. Que demander de plus ! Il ne me semble pas qu'il y avait de l'eau chaude au robinet, mais tant pis, on se toilette un peu, on a vu bien pire ! Ca fait du bien, la dernière "douche" datait aussi du Pla de Boet... On retrouve aussi du réseau téléphone !! On n'en avait plus eu depuis Gavarnie, ça nous permet de rassurer les familles, voire même de les bluffer car personne n'aurait parié que nous serions pile dans les temps de notre programme, surtout après ce qu'on leur avait raconté à Gavarnie ! On a du temps alors on se plonge dans l'étape de demain : elle est monumentalement longue. Le guide annonce : 13h de marche effective et presque 2000m de dénivelé positif, une folie furieuse ! Alors comme ce soir on est en avance, on se propose de manger ici, puis de repartir ensuite et de marcher le plus loin possible jusqu'à la nuit, on ne devrait pas avoir de problème à planter la tente, le terrain est relativement plat et herbeux dans la région. 

Sitôt les nouilles chinoises avalées, nous rechaussons sacs et godasses et nous partons plein Sud pour rejoindre le GR10 sur le Pla de Bones Aures. Mais nous n'avions point vu l'énorme cumulonimbus caché par le centre d'information : il se dirige droit sur nous et on entend déjà gronder le tonnerre. On n'a pas parcouru 500 m que les premières gouttes se font sentir. J23 4582 On sort la carte, il y a une cabane au bord du lac de la Pradella à moins d'un kilomètre de là, en espérant qu'elle soit ouverte et confortable... Nous courrons carrément pour les derniers 500 m, il tombe à verse et les éclaires lézardent le ciel sous notre nez, le temps a complètement changé en moins de 15 minute. C'est l'apocalypse ! Enfin, nous arrivons à la cabane : deux portes. La première, évidemment, c'est l'étable ou la porcherie, je ne sais pas trop, pas moyen de rester là. La deuxième s'ouvre sur un capharnaüm, mais dans une pièce à gauche il y a un grand bas-flanc, sans matelas par contre... Sur les parois en aglo se sont exprimé tous les philosophes et poètes de la planète : "elle est bone Simone !", "coment je lé n*** ta vu !", etc (les fautes d'orthographe sont de mémoire)... On passera la nuit là... Et demain sera une journée sans fin, terrible ! Mais elle sera ! Car nous avons la pêche et nous avons bien l'intention de la garder ! 

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8 janvier 2012 7 08 /01 /janvier /2012 15:30

J22 4552 On s'est levé tôt ce matin, enfin ! 7h00 ! Sûrement pour continuer de faire bonne figure vis-à-vis de Marco le jeune Italien avec qui on a partagé le refuge cette nuit et avec qui on a passé une bonne partie de la soirée à discuter... de rando évidemment ! On lui a raconté notre aventure, il nous raconta la sienne. Moins épique peut-être, mais avec un matos de malade. Son sac datait des années 70 avec une pseudo claie en alu, vide, il pesait déjà 5 kg ; il portait des chaussures de rando qu'il avait sûrement emprunté à son père (ou son grand-père) : des énormes godasses en cuire rigide pour faire de la marche sur glacier avec des crampons. Et je ne parle pas de ce qu'il avait à l'intérieur du sac : un foutoir innommable où le superflu se disputait à l'inutilement lourd. Bref, un poil inexpérimenté, mais super sympa, costaud et courageux : un chic type ! 

Départ aux alentours de 8h30 je pense. N'allez pas croire que la nuit, même confortable sur des matelas, m'a complètement requinqué, que nenni ! Je galère dès la première côte de la matinée, 20 min après le départ. On a décidé de rejoindre la crête entre le val de Ransol, où nous somme, et le val d'Inclès en hors sentier, pour pouvoir arriver le plus haut possible dans le val d'Inclès et ne pas avoir à tout le remonter. 

 Je déguste, mais au prix d'une heure d'effort, on arrive enfin à la crête. Nous dominons en nous retournant tout le vallon de Ransol, avec le terrible col des Meneres en face et la cabane Coms de Jan sur son replat au dessus de la forêt. La suite n'est pas forcement plus engageante, bien qu'en descente. Je sais pour y être passé deux fois, que de la crête, on peut trouver un léger sentier qui lie quelques petits étangs, mais qu'à un moment où un autre, pour descendre dans la vallée, il va falloir y aller tout schuss dans la pente. Le problème c'est que ce versant est très boisé à mi-hauteur jusqu'en bas et bien fourni en barres rocheuses. J22 4553 En outre, les dernières fois, nous allions au camping d'Inclès en bas de la vallée, alors qu'aujourd'hui nous devons nous diriger vers le haut de la vallée. Le début est facile avec sentier et pâturages, mais très vite, les pins font leur apparition et le sentier que nous suivons n'a visiblement pas l'intention de descendre dans la vallée et c'est bien dommage... Alors on décide de prendre l'option que j'avais jadis emprunté : un petit valon creusé dans la pente par un ruisseau heureusement aujourd'hui à sec et qui descend perpendiculairement aux lignes de niveau. C'est étroit, c'est glissant, c'est très pentu, il fait chaud, on s'accroche aux rochers tant bien que mal, mais au moins on descend, ce qui est l'objectif principal. Après une bonne heure d'acharnement, de chutes, de rattrapages aux branches, le goulet croise un sentier que nous décidons de suivre : on a eu de la chance de ne pas se flinguer une cheville ou pire là-dedans, on arrive presqu'en bas, on va la jouer raisonnable, pour changer. 

C'est donc sous un soleil de plomb que nous prenons pied sur la route d'Inclès. Nous sommes relativement haut dans la vallée, ce qui n'est pas un mal : ça nous évite quelques kilomètres de goudron. Car oui, j'ai omit de le dire, mais il existe bien un chemin qui descend de la crête jusque dans la vallée, mais celui-ci arrive tout en bas de la vallée et n'était donc pas une option pour nous. 

Il fait bien chaud et nous faisons une halte au départ du chemin vers les lacs de Siscaro car mes intestins se rappellent à mon bon souvenir. C'est un peu touristique le coin et il y a pas mal de monde qui se ballade, va falloir ruser et trouver un coin tranquille...! Et nous repartons. Il est encore un peu tôt et nous décidons de pousser jusqu'aux lacs pour casser une graine. Les chips et le saucisson engloutis, je me permet d'aller encore une fois fumer les terrains alentour. Je me sens un peu comme le pluvier de Socrate (link)... Bien que j'aurais préféré ne pas vivre selon mes désirs, au moins pour ce détail gastrique... J22 4554 

La bonne nouvelle de la journée, c'est qu'il ne reste plus qu'une seule petite montée, elle est devant nous, et ensuite, c'est les grands plateaux avant d'arriver au Pas de la Case. Ca me rebooste un petit peu, le repos est proche ! Alors on se remet en marche vers le Port Dret. En haut c'est le vent et la steppe mongole qui nous happent, j'adore ce genre de paysages ! Il est 14h00 ou 14h30, dans 2h on est arrivés. Peut-être pour la première fois depuis le début de notre traversée des Pyrénées, on est à la cool : les jambes sont lourdes mais la perspective de se reposer en variant notre régime alimentaire allège notre esprit. 

On approche. Déjà, les premier signe de la "civilisation" commencent à apparaître : traces de 4x4 de plus en plus nombreuses et balafrant inesthétiquement la steppe, des antennes, des pylônes. Et enfin, il est 16h00, sur la colline surplombant le Port d'Envalira, nous apparaît, immonde, le Pas de la Case ! 

Cela fait plus de 2 semaines que nous avons vu notre dernier village digne de ce nom, et là, c'est carrément une ville, au milieu de nulle part qui nous saute au visage. Cela fait toujours le même effet : le contraste est tellement fort, choquant, ça donne la nausée. Au milieu d'un site magnifique est venu pousser cette verrue que la société de consommation peut produire, une tumeur aux Pyrénées, un bubon purulent, ce que l'Homme fait de pire dans ce que la Nature fait de mieux.  Et pourtant, cette négation de la beauté sauvage va nous sauver la vie, ou tout au moins notre HRP, car nous allons pouvoir manger et reprendre des forces. J22 4556

Le choc est encore plus violent quand on rentre dans la ville : ça grouille de beaufs en tongs et marcel remplissant fébrilement les coffres de leurs Mercos de litres de Pastis et de monceaux de clopes, à croire que la fin du monde est pour la semaine prochaine ou que les Bouches du Rhone sont en rupture de stock (oui une majorité de beaufs en tongs et marcel était de la région PACA... Coïncidence ...?). Toujours est-il que nous nous attelons à notre mission de l'aprem : reprendre des forces. Pour ça, on se trouve un supermarché (pas trop dur, il y en a 3 par rue) et tout y passe : Coca (pour le bide), jus de fruit, gâteaux secs, on prend tout ça et on va se poser en plein centre ville, sur un banc au soleil. Et on se goinfre ! On reste là 3 bonnes heures. Et durant tout ce temps, plutôt que de bronzer bêtement, que fait-on ? On taille un par un tous les passants de la rue, touristes en tongs ou pseudo parisienne venue s'acheter son sac-à-main Dior à moitié prix. Tout le monde y passe, ouvertement, une sorte de vengeance pour la destruction du paysage. On n'a d'autant moins de scrupules que ça fait 3 jours qu'on ne s'est pas lavés, on a des fringues qui commencent à être bien défoncées, bref on passe pour les marginaux de base, moitié hippies, moitié clodos, en tous cas, complètement inadaptés à l'environnement ambiant. Alors qu'objectivement, ce sont eux qui font tache au milieu des Pyrénées... 

L'après-midi passe sous le regard outré des gens et sur les coups des 19h30, nous allons nous faire un resto pour parachever notre remise en forme : ça sera tartiflette pour nous deux ! J22 4557 Ceci fait, il nous faut trouver un endroit pour dormir. Ca ne sera pas possible dans le coin. Ca fait moins de 5h qu'on est là et on n'en peut déjà plus de cette ville, il nous tarde de retrouver les alpages. Alors, tandis que le soleil passe derrière la crête, nous remettons nos sacs sur le dos et nous avançons sur la suite de notre trajet en revenant en France. Vers 21h30/22h00, il commence à faire bien sombre, nous sommes sur un replat qui domine les constructions abandonnées des mines de Pimorent sur la Coma dels Pedrons. C'est là que nous planterons la tente pour la nuit, loin du tumulte incessant du Pas de la Case. Demain, nous serons dans les Pyrénées Orientales ! 

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17 décembre 2011 6 17 /12 /décembre /2011 18:45

J21 4543 Très chers lectrices et lecteurs, pardonnez-moi pour le retard, déjà, et pour ce qui va suivre dans les prochaines étapes. A partir d'aujourd'hui, 21ème étape de notre HRP, nous avons arrêté d'écrire notre journal de bord. La conséquence directe d'une telle stupidité sera que les articles se feront sûrement beaucoup plus court que d'habitude : les scènes se passant il y a plus de 2 ans déjà, ma mémoire commence à faire défaut sur certain passages, certaines anecdotes. J'essaierai néanmoins d'être le plus précis et exhaustif possible. Sur ce, bonne lecture. 

 

Une fois de plus, au levé du jour il fait beau ! On a mis le réveil tôt ce matin, et pour une fois on s'y est tenu : 6h30 ! Après 20 jours de camping sauvage, on est rodés sous la tente. On n'a même pas besoin de sortir du sac de couchage, le petit déjeuner est à portée de main, quasiment prêt. Muesli, lait en poudre, sucre, eau le régal renouvelé tous les matins ; autant le saucisson et les chips commencent sérieusement à nous sortir par les yeux, autant le muesli nous fais encore et toujours plaisir ! J21 4544

On est partis, 8h, décidément on n'arrivera pas à être efficaces le matin... Le chemin jusqu'au port de Boet est facile : balisage rouge et blanc, ça ne devrait pas poser trop de problèmes. C'était sans compter le petit troupeau de chevaux et les 2-3 adorables petits poulains qui nous déconcentrent lâchement. On perd les balises un moment... Bon, on sort la boussole, on repère le faux col auquel on arrive rapidement et c'est repartit. On arrive au soleil, Nico se pose pour enlever son collant, je continue. J'ai pas la forme des grands jours, la course d'hier soir m'a vidé, comme prévu, mais néanmoins j'avance à bonne allure et j'arrive au Port de Boet quelques instant avant Nico qui cavalait derrière pour me rejoindre.   

Ca y est ! Nous sommes revenus en France après deux semaines de marche en Espagne ! La dernière fois que nous avions foulé le sol français, c'était au Port de Pinède juste après Gavarnie, la vache ce qu'on a fait comme chemin !! En se retournant, on aperçoit encore l'Aneto très très loin, et pourtant tellement moins loin que Gavarnie, l'Ossau ou Hendaye ! Il souffle un vent de fou au col et ça caille sec, on se trouve un gros rocher orienté au soleil pour faire une pause. On a mis 1h30 pour monter jusqu'ici. J21 4545

Quelques minutes plus tard, un type déboule du côté français en courant. Il vient nous tchatcher, il est français, la soixantaine au bas mot et fait du trail. Là, il s'entraîne pour le trail des Pyrénées, une course de 160 bornes en montagnes que les meilleurs font en 20h non stop (link). Bref, un bourrin. Aujourd'hui, son objectif était de faire du dénivelé et il avait pour ambition de monter en courant au Port de Rat, le col pile en face, de l'autre côté de la vallée, où nous devrons passer dans quelques heures. Le gars est sportif, mais niveau orientation ça a pas l'air d'être ça...! Bon, à sa décharge, la vallée de Soulcem en bas est noyée dans une mer de nuages et est en train de se dégager. Qu'à cela ne tienne ! Il va traverser la vallée et se faire le Port de Rat, et pour le coup, il en aura fait du dénivelé ! Et le voilà reparti à fond. Je ne suis pas sûr que même sans sac, j'arrive à le suivre... J21 4546

Avant de partir, il nous a donné quelques explications pour traverser la vallée et rejoindre le Port du Rat, notre guide n'est pas très précis dans la région. En gros, à la nouvelle cabane, on prend à droite (plein sud) et on se débrouille pour arriver en bas. Cool. On lui a aussi demandé qui avait gagné le Tour de France et nous avons été soulagés d'apprendre que ce n'était pas Lance Amstrong ! 

 

Let's go, la nouvelle cabane, c'est bon, on pique plein sud alors. Et on tombe sur un gars sortis de nulle part, en mocassins de ville et petite veste jetée négligemment sur l'épaule. Assez surréaliste quand on sait que le guide prévoit un peu de désescalade pour arriver au fond de la vallée... Passons. C'est complètement hors sentier, sur des grandes dalles de schiste, ça glisse, ça s'effrite, c'est pas si simple. Des barres rocheuses aussi, j'en désescalade une (c'est le guide qui l'a dit !) pendant que Nico arrive à faire le tour. On rejoint un vague sentier qui nous amène dans l'axe de la vallée de Soulcem, il reste encore une bonne partie à descendre. Je commence déjà à tirer la patte et il n'est que 11h30... Pas bon signe. 

Nous voilà finalement au fond de cette grande vallée en U. Le Port du Rat nous fait face : tout ce qu'on vient de descendre, il faut maintenant le remonter directement. Déprimant parfois ! J'ai déjà les jambes en coton, beaucoup plus tôt que d'habitude ; le rattrapage du temps perdu se paye à un prix de plus en plus élevé à mesure que les jours passent. On grignote un morceau au pied de la montée et nous voilà soufflant et suant en plein soleil. Il nous faut 1h pour atteindre l'Andorre. J21 4547

 

Un col de plus et un troisième pays où nous entrons maintenant. Le chemin arrive rapidement sur les pistes de la station de ski d'Arcalis et nous nous arrêtons longuement au pied des pistes sur une terrasse pour boire un Coca. On regarde la carte, il doit être dans les 14h, l'objectif annoncé de la journée, maintenant que nous sommes en avance sur notre programme initial est de garder cette avance et de pousser jusqu'à la cabane Coms de Jan au lieu du refuge de Sorteny. Mais ça semble assez compromis : il reste au moins 20 km à faire dont 10 de goudron horribles, et c'est loin d'être plat... Et moi j'y suis... à plat ! On n'a plus envie de se lever de ce banc, mais il faudra bien y aller à un moment où un autre... On reste comme ça une bonne heure et demie, vidés. 

Puis finalement, on se remet en marche et on entame les 10 km de route. Devant l'ampleur de la tâche, on se tombe d'accord sur le fait de faire du stop, mais il y a très peu de voitures et on est repoussants ! On marche comme ça une petite demie-heure, 3-4 voitures sont passés sans même ralentir... Quand au détour d'un virage, enfin, l'une d'elle daigne s'arrêter !! Ce sont des Brivistes !! Le monde est bien petit décidement !! J21 4549 On leur explique notre périples, ils sont enchantés d'y participer à leur manière. On leur dit de nous déposer au croisement de la route d'El Serrat avec la petite route menant au parking de Sorteny, ça nous avancera grandement ! Au croisement, ils décident de nous déposer carrément au parking, on n'en espérait pas tant, mais ça nous dispense de 1,6 km de route, et dans notre état, c'est toujours bon à prendre ! 

 

Ce coup de pouce inespéré nous redonne du baume au coeur et c'est tout ragaillardis que nous prenons la piste qui mène au refuge de Sorteny. Mais très vite, on est rattrapé par la chaleur accablante de cette fin d'après-midi. Je me demande si on ne ferait pas mieux de s'arrêter à Sorteny, même s'il n'est pas trop tard (~17h) histoire de se reposer correctement. Nico préfère pousser encore. Alors on commence à remonter le val de Sorteny. Il est un peu tard dans la saison et le gros des fleurs est déjà passé, mais je me souviens que la dernière fois que j'étais passé par là, la vallée explosait de couleurs. J21 4550

On prend l'embranchement de vallée qui part plein Est, un bon troupeau d'isards hesite un long moment avant de traverser notre sentier sous notre nez.  Je galère de plus en plus. On voit le col des Meneres (ou Mineurs) en haut devant, il faut y passer. Nico me distance largement dans la montée finale, je pousse comme un damné sur mes bâtons de rando car mes jambes ne me portent plus, c'est un calvaire ! Finalement j'y arrive et rejoins Nico qui m'attend depuis un bon moment. Je suis rincé, vidé, lessivé, mort... Et si on va jusqu'à la cabane de Coms de Jan, il doit rester pas moins d'une heure de marche encore, je ne sais pas si j'y arriverai cette fois. Du col, on aperçoit le replat où se cache cette cabane, il paraît tellement loin ! Je suis désespéré. 

 

Mais Nico m'encourage et nous repartons, une fois de plus. Je ne suis plus que l'ombre de moi-même dans la descente, je voudrais voir la cabane derière chaque caillou, à chaque virage du chemin, mais je sais qu'elle n'est pas là, je sais qu'elle est loin encore. Et Nico de me remonter le moral, de me tirer, de me pousser, de me faire penser aux matelas confortables qu'on va trouver dans la cabane. Alors je continue un peu plus, mais chaque pas est plus difficile, je supplie Nico pour qu'on plante la tente au premier carré d'herbe un peu plat, il tient bon et m'oblige à faire de même. J21 4551 Finalement, une grosse heure, qui m'a paru 100 ans, après avoir passé le col des Meneres, nous arrivons à la cabane où je m'écroule. Il doit être 20h, on l'a fait ! Une de plus ! Et une de moins avant la fin !! Et nous avons toujours une petite demie journée d'avance sur notre timing !! Je n'y crois pas, on se congratule devant le regard amusé d'un jeune Italien, Marco avec qui nous passerons la soirée à discuter. 

Néanmoins, je ne suis pas du tout confiant sur les étapes à venir vu mon état de fatigue, vu notre état de fatigue, Nico bien que plus en jambe aujourd'hui accuse aussi de plus en plus le coup. Alors on convient que demain sera notre jour de repos : ça ne sert à rien de s'acharner à garder une demie journée d'avance sur le timing, on n'est pas à ça près, surtout si sa sauvegarde nous oblige à franchir la ligne rouge. Ce serait vraiment dommage d'abandonner ici, si près du but pour un excès d'orgueil. Demain, on est d'accord, on ira jusqu'au Pas de la Case et on passera l'après-midi à se reposer, à manger des trucs normaux, à aller au resto, à boire et se reposer, on le mérite plus que 1000 fois ! 

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16 octobre 2011 7 16 /10 /octobre /2011 13:14

J20 4524 On se réveille le dos un peu en compote il faut dire : le lit de graviers n'était pas si confortable malgré la fatigue d'hier.On part vers 7h40, la journée promet d'être longue. Hier, à cause de notre égarement, nous avons décidé de changer d'itinéraire pour cette étape. On ne rejoint plus le lac de Certascan au Nord pour arriver au refuge Barbote au Sud, on coupe par le village de Tavascan et le Pla de Boavi par un itinéraire plus austral. Le gros inconvénient, c'est qu'il va nous falloir parcourir pas moins de 15 km sur de la route ou de la piste avant de retrouver un sentier potable.

 

Aussi surprenant qu'il y paraisse, compte tenu de notre état de fatigue, on supporte mieux de marcher sur un sentier que sur une piste. J20 4525 Au début, la piste est plus agréable, mais à la longue elle est extrêmement monotone pour l'esprit et aussi pour les pieds. Pour l'esprit déjà, car un cheminement monotone où il n'y a rien d'autre à faire qu'à mettre un pied devant l'autre passe beaucoup moins rapidement qu'un petit sentier empierré où il faut être attentifs à chaque détails pour ne pas trébucher, mais aussi apprécier le paysage tout en restant concentré. Ensuite pour les pieds : le revêtement lisse et plat de la route et la relative facilité d'une piste oblige le pied à poser toujours les même parties de sa plante au sol de centaines et des centaines de fois, ce qui est extrêmement usant. Au contraire, sur un chemin chaotique, les chevilles se tordent un peu, épousent le relief, les orteils et la plante sont écrasés différemment en fonction des aspérités du terrain ce qui permet de reposer (un petit peu) les parties non sollicitées.

 

Bref, on gagne du temps sur notre timing initial ( Fiche technique de notre traversée des Pyrénées en 28 jours par notre HRP ), mais ça va être galère ! La descente vers Tavascan se fait moitié sur la route, moitié sur un chemin. On coupe les virages qui mènent à la station de ski, par un sentier herbeux très en pente, on a les cuisses assez faibles de la veille. La route, comme toujours est trop longue et pénible, en revanche, le chemin pour arriver à Tavascan est bien agréable et très joli. A Tavascan (9h30), nous remplissons nos gourdes à la fontaine et cherchons une boulangerie. Si on pouvait changer l'ordinaire de nos repas avec seulement un peu de pain, ça serait du grand luxe ! Mais malheureusement, Tavascan ne possède pas de commerces de bouche... 

 

Alors on attaque la piste qui mène au Pla de Boavi. J20 4526 Elle est interminable ! Le soleil, bien haut maintenant la chauffe à blanc et l'atmosphère est étouffante. Les nombreux 4x4 qui nous dépassent soulèvent des nuages de poussière qui nous asphyxient. On fait une pause à l'ombre sous le hameau des Bordes d'Artamont, en gros à mi-chemin entre Tavascan et du Pla de Boavi. On regarde la carte pour voir si on n'a pas raté un chemin hier en faisant notre itinéraire, si on ne peut pas trouver un passage qui raccourcirait la piste. Et il y a bien en effet un petit trait en pointillé qui remonte la vallée de Becero. Il nous permettrait un super raccourci ! On tente le coup. On traverse de torrent sur une sorte de petit barrage et l'on suit une large piste qui mène au début de la vallée. Cependant, malgré quelques traces, il n'y a pas de chemin bien net et la végétation luxuriante empêche toute progression.  On ne s'acharne pas, il y a 1000 m de dénivelé, si c'est out le long comme ça, on en a pour 10h de lutte. On rebrousse chemin (ce n'est pas souvent que ça nous arrive et ça fait mal). On aura perdu une bonne demi-heure... On finit donc de monter au Pla de Boavi et on se fait une longue pause au bord du ruisseau pour manger. 

 

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L'eau est cristalline et Nico ne résiste pas à se baigner. Je ne sais plus pourquoi, mais j'apprécie franchement le saucisson du jour ! Il est 13h30, le soleil tape comme un sourd, on ne peut pas repartir tout de suite. On attend une petite demi-heure de plus. Mais il nous faut repartir finalement. Le Pla de Boavi est une fournaise innommable, une pelouse brûlée plus sèche qu'un paillasson. C'est là que nos intestins se rappellent à notre bon souvenir. Il semblerait que c'est souvent le lendemain de journées plus intenses encore que les autres que nous nous retrouvons avec le bide en vrac...

 

J20 4530Bref, maintenant et comme pratiquement tous les jours, nous avons devant nous une montée à un col de plus de 1000 m de dénivelé. Et il fait chaud, très chaud... Le seul "lièvre" que nous avons pu nous mettre sous la dent c'est deux Espagnols qui nous ont doublé pendant que nous mangions. L'objectif, comme à chaque fois : les rattraper le plus rapidement possible. Mais ils sont relativement lents et ne sont pas bien loin alors on les dépasse rapidement. Et l'ascension continu, maintenant, face à nous-même. La montée est en deux étapes : une longue remontée jusqu'à un replat en suivant l'axe de la vallée, puis il faut partir plein Est pour franchir le coll de Sellente. Mais pour l'instant, on grimpe la tête dans le guidon. A mi pente, c'est l'arrêt aux stands pour moi aussi. Ca ne nous lâchera donc pas avant la fin ? Il faudrait peut-être penser à changer de régime alimentaire un de ces quatre ! D'ailleurs, si on arrive au Pas de la Case dans 2 jours, ça lancera le début de notre renouveau culinaire car on commencera à croiser des magasins de bouffe. On repart pour le fond de la vallée où un bon raidillon nous attend. J20 4531 En haut, on arrive à un replat où trône un refuge en ruine qui a visiblement brûlé. On fait une bonne pause ; il est 16h00, le refuge de Barbote, notre arrivée initiale (avant le gain de temps de la veille) est à moins d'une heure de marche. Nous avons traîné pas mal aujourd'hui à cause de la chaleur, à midi, en essayant un nouveau chemin, et l'on a donc perdu la majorité de notre avance. Néanmoins, on n'a pas envie de voir nos efforts de la veille réduits à néant et on décide donc de continuer comme on l'avait prévu hier : direction  le Plat de Boet. 

 

La pause fait du bien, je me goinfre de barres céréalières et de gâteaux. On repart ensuite pour ce qui devrait être la dernière grimpette de la journée. Mais bien qu'elle soit courte, comme après le refuge de la Restanca, je me chope une petite fringale dans la côte. J'arrive au col de Sollente les jambes en coton. Je remange quelques barres de céréales et ça va mieux. 

 

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En bas, on voit le lac de Barbote et son refuge orange fluo perché sur son éperon rocheux. Il y a du monde au refuge, tant mieux, on ne s'arrête pas. Il est 17h30 quand on passe en dessous, alors certes, on aurait pu s'arrêter, ça nous aurait déjà fait une bonne journée de marche, et en plus c'était l'arrêt prévu à notre programme initial. Mais après toutes les épreuves qu'on a passées : la journée de retard, son rattrapage et maintenant les quelques heures d'avance qu'on a sur notre programme, on a les jambes pour continuer et garder cet avantage. On voudrait pousser jusqu'au Pla de Boet, portes de l'Andore.

 

La troupe d'Espagnols au refuge est en fait sur le départ et se retrouve juste derrière nous sur le chemin. Une fois n'est pas coutume, ils nous dépassent et galopent devant. Au bout de dix minutes, ils ont perdu le chemin et errent comme nous au milieux de petits pins accrochés à un gros verrou glacière. On voit le chemin tout en contre bas, relativement loin de là où on est. Le meilleur moyen, c'est de couper tout schuss dans l'herbe. On s'y jette tandis que les Espagnols tergiversent. On ne les reverra plus. C'est pentu, avec des creux et des bosses et il faut être très attentif, surtout en fin de journée, la blessure arrive vite. D'ailleurs, Nico se prend une gamelle, mais au ralenti, donc je ne vois que la conclusion : un pied qui dépasse d'une petite dépression dans l'herbe. Pas de bobo, juste une bonne rigolade ! 

 

Je n'ai plus d'eau depuis un petit moment quand on arrive à une cabane qui domine la vallée, la vue est superbe, mais la chaleur et l'odeur des genêts surchauffés sont étouffantes. Nico m'abreuve pour finir. On récupère un petit sentier tout mignon qui part à plat, légèrement en descente, ça nous fait un bien fou. Le problème, c'est qu'on croit que c'est bientôt fini alors on est plus relax ; il nous reste encore 1h30 de marche, mais on ne le sais pas encore...! Au bout d'une heure, on est arrivée au fond de la vallée et on longe la rivière en remontant. On distingue une piste de l'autre côté derrière les arbres et on sent que la fin est proche. Je commence à en avoir franchement marre, alors comme le sentier est plutôt plat, j'accélère comme un taré, je pars presqu'en courant pour griller mes dernières forces et arriver plus tôt. Nico se marre derrière moi car des fois il a du mal à suivre : je suis un robot hypnotisé par le rythme de mes bâtons, tac, tac, tac, tac, de plus en plus vite. Et enfin arrivent des panneaux ! Pla de Boet 20 min. 

 

J20 4534 "Je suis mort", je dis à Nico. Fou rire. "Tu m'étonnes ! T'as vu comment t'y allais ?!" Re fou rire. Un petit panonceau plus loin indique toujours Pla de Boet 20 min, mais aussi Pla de Boet : 500 m. Il doit y avoir de papy et mamies qui viennent se promener par ici ! Et effectivement, 5 min plus tard, on arrive devant un magnifique replat herbeux avec ruisseau et petits arbres, parfait pour planter la tente. On se fait une bonne toilette dans la rivière avant que le soleil se cache derrière la montagne, ça fait vraiment du bien après la chaleur et la poussière de la journée ! Encore une fois, on ne le sais pas encore, mais c'est notre dernière vraie toilette de la traversée et il nous reste ce soir plus d'une semaine de marche ! 

 

J20 4535

 

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